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apollonius.

Tu monteras sur elles, aussi ; tu te tiendras aux oreilles. Nous irons, nous irons…

antoine
pleurant.

Oh ! oh !

apollonius.

Qu’as-tu ? nous t’attendons !

antoine
sanglotant.

Oh ! oh ! oh !

damis.

Serre ta ceinture ! noue tes sandales !

antoine
sanglotant plus fort.

Oh ! oh ! oh ! oh !

apollonius.

Chemin faisant, je t’expliquerai le sens des statues, les différences de leurs attitudes, la raison de leurs formes, pourquoi Jupiter est assis, pourquoi Apollon est debout, pourquoi Vénus est noire à Corinthe, carrée dans Athènes, conique à Paphos.

antoine.

Oh ! qu’ils s’en aillent, mon Dieu, je t’en prie, qu’ils s’en aillent !

apollonius.

La connais-tu la Vénus uranienne, qui brille sous son arc d’étoiles ? t’a-t-on dit les mystères de l’Aphrodite prévoyante ? As-tu jamais palpé la poitrine sèche de la Vénus barbue, ou médité les colères d’Astarté furieuse ? N’aie souci, j’arracherai leurs voiles, je briserai leurs armures ; avec moi tu marcheras d’un pied robuste sur la crête de leurs temples, et nous atteindrons ensemble jusqu’à la Mystérieuse et l’Inaltérable, jusqu’à celle des