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LOYS XI.

d’avoir une fleur de lis à tes pieds pour marquer que ton arbre est la possession du roi.

Le fou, effrayé.

Assez ! sire, grâce ! que vous ai-je fait ? quelque chose de bien atroce, sans doute, jamais vous ne m’avez raillé ainsi.

Le Roi

Mais non, imbécile, je suis de bonne humeur ; vois donc comme je ris.

Il rit aux éclats.
Le fou, à genoux.

Oh ! sire, votre haleine est de sang, vos regards me mangent !

Le Roi, le relevant à coups de pied.

Allons donc, paresseux, tu pleures ? Je te paie pour rire et je veux que tu ries jusqu’au bout, je veux que ton dernier soupir me fasse pâmer d’aise, et que tes convulsions soient neuves et amusantes. Un homme d’esprit de ta trempe ne doit pas mourir comme les autres… Tristan tarde bien à dérouler ses cordes.

Le fou

Oh ! oui ! c’est parce que je vous ai entendu prier la Vierge pour votre frère, n’est-ce pas ? Non, je n’ai rien entendu, je ne dirai rien. Grâce, sire !

Le Roi

Peu m’importe ! Je savais que tu étais là. Crois-tu donc que rien m’échappe ?

Le fou

Eh bien, laissez-moi vivre, de grâce !