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sent en cet état, et qu’il ne revînt jamais à Marseille, ils s’emparèrent de la maison épiscopale, firent l’inventaire des ornements destinés au service de l’autel, ouvrirent les portes, dépouillèrent les celliers et se saisirent, comme si l’évêque était mort xxxv, de tout ce qui appartenait l’église, portant contre le pontife diverses accusations, qui, grâce à Jésus-Christ, ont été reconnues fausses. Childebert ayant fait la paix avec Chilpéric, adressa des envoyés au roi Gontran pour qu’il lui remit la moitié de Marseille qu’il lui avait donnée après la mort de son père, lui faisant savoir que, s’il s’y refusait, ce refus lui coûterait cher ; mais celui-ci, ne voulant pas la rendre, fit fermer les routes de son royaume, afin qu’aucun n’y pût trouver passage pour le traverser. Ce que voyant Childebert, il envoya à Marseille Gondulphe homme de naissance sénatoriale, et que de domestique il avait fait duc[1] xxxvi. Comme il n’osait pas traverser le royaume de Gontran, il vint à Tours. Je le reçus avec amitié et le reconnus pour un oncle xxxvii de ma mère ; je le retins cinq jours avec moi, et lui ayant donné ce dont il avait besoin je le laissai aller ;

  1. Les domestiques des rois Francs, étaient les hommes attachés à la personne du prince et qui logeaient dans l’intérieur du palais, ils étaient sous les ordres d’un chef appelé le comte des domestiques ; leur condition, loin d’être servile, était au contraire une des plus élevées ; les lois barbares leur donnent le titre d’optimates ; les principaux d’entre eux siégeaient dans les plaids ou cours judiciaires du prince ; c’étaient, en un mot, des fidèles plus spécialement attachés au service personnel de leur seigneur. Du reste cette signification du mot domestique s’est perpétuée dans le moyen âge et jusque vers la fin du 17e siècle ; les jeunes gens qui recevaient dans un château leur éducation chevaleresque étaient souvent appelés domestiques ou gens de la maison, et le cardinal de Richelieu avait un grand nombre de gentilshommes parmi ses domestiques.