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sinuations de la reine, il envoya à Braine son fils Clovis, pour qu’il y pérît de la maladie, car le mal qui avait tué ses frères régnait là avec fureur. Cependant il n’en reçut aucune incommodité. Le roi se rendit à sa maison de Chelles, dans le territoire de Paris. Peu de jours après, il fit venir à lui Clovis, dont il ne sera point hors de propos de raconter ici la mort. Comme il habitait à Chelles avec son frère, il commença à se vanter avant le temps, et à dire : « Voilà que mes frères sont morts et que tout le royaume me demeure. Les Gaules tout entières me sont soumises, et les destinées m’ont accordé l’empire universel. Voilà mes ennemis tombés entre mes mains, et j’en ferai ce qu’il me plaira. » Et en même temps il diffamait sa belle-mère, la reine Frédégonde, en paroles inconvenantes. Celle-ci, l’ayant su, fut saisie d’une grande frayeur. Dans les jours suivants, quelqu’un vint et dit à la reine : « Tu demeures privée de tes fils, et cela est arrivé par les trames de Clovis ; car, amoureux de la fille d’une de tes servantes, il a employé les maléfices de la mère à faire périr tes fils. Je t’avertis donc de ne pas espérer pour toi un meilleur sort, car ce qui te donnait l’espoir de régner t’a été enlevé. » Alors la reine, pénétrée de crainte, enflammée de colère, aigrie par une perte récente, fit saisir la jeune fille sur qui Clovis avait jeté les yeux, et, l’ayant fait cruellement fustiger, ordonna qu’on lui coupa les cheveux, et les fit suspendre à un pieu devant le logis de Clovis. La mère de la jeune fille fut aussi liée et livrée à de longs tourmens, et on la força de déclarer véritables les choses qui