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diable, car il est menteur et père du mensonge[1]. » Lui donc s’en étant allé confus, je riais beaucoup de cet homme qui pensait qu’on devait croire de telles choses. Enfin, dans une certaine nuit, comme après avoir célébré Vigile dans la basilique du saint évêque, je dormais couché dans mon lit, je vis un ange volant par les airs, qui, en passant au-dessus de la sainte basilique, dit d’une voix forte : « Hélas, hélas, Dieu a frappé Chilpéric et tous ses fils, et il n’en survivra aucun de ceux qui sont sortis de ses reins, pour gouverner à jamais son royaume. » Il avait alors de plusieurs femmes quatre fils sans compter deux filles xxxv. Lorsque par la suite ces paroles eurent été accomplies, je connus clairement la fausseté de ce qu’avaient prédit les devins. Tandis que Mérovée et Gontran demeuraient dans la basilique de Saint-Martin, la reine Frédégonde envoya vers Gontran Boson qu’elle protégeait en secret à cause de la mort de Théodebert, et lui fit dire : « Si tu peux faire sortir Mérovée de la basilique, afin qu’on le tue, je te ferai un grand présent. » Lui, qui croyait que les assassins étaient près de là, dit à Mérovée : « Pourquoi restons-nous ici, comme des paresseux et des lâches ? Et d’où vient que semblables à des imbéciles, nous nous cachons autour de cette basilique ? Faisons venir nos chevaux, prenons des faucons, allons à la chasse avec des chiens, et jouissons de la vue des lieux ouverts ; » ce qu’il disait par artifice, afin de l’éloigner de la sainte basilique. Gontran avait certainement d’ailleurs de bonnes qualités ; mais tou-

  1. Év. sel. S. Jean, chap. 8, v. 44.