Page:Guindon - En Mocassins, 1920.djvu/193

Cette page a été validée par deux contributeurs.
186
en mocassins

mouvement du monstre, il se décide à l’embraser… Le feu n’est pas la vie, mais lui ressemble.

Peu à peu, la chaleur pénètre la statue dont l’argile rougit.

La flamme brille entre les squames du dos et de la poitrine ; la moustache pelliculeuse et les oreilles deviennent transparentes ; les yeux de langouste sont deux charbons ardents. Le tout présente un horrible aspect.

Vivement tenté de pousser plus loin les essais, Chémanitou perce au côté le corps de caïman, mais n’y entre pas encore. Il fait d’abord marcher la statue par le seul pouvoir de sa volonté… Enfin, il se décide à lui donner un peu de vie, mais sans lui retirer le feu… Aussitôt le monstre sourit… et son sourire fait presque oublier sa laideur.

Plus que jamais, Chémanitou est convaincu qu’il ne doit pas gâter le reste de son œuvre par une telle créature, par cette forme bestiale, au front intelligent, aux mains puissantes, au menton hardi, aux lèvres souriantes et perfides… Il la saisit, la jette dans la cave, mais oublie de lui ôter le peu de vie qu’il lui a donnée.

***

Il est depuis longtemps sous terre cette être dan-