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en mocassins

ver revient couvrir l’île de neige ; Kabébonicka fouette et brise les roseaux desséchés, gémit tristement dans les algues et la pierraille du rivage ; les brises printanières reviennent chargées de parfums ; le chant des oiseaux se mêle de nouveau à la cadence des vagues : Chémanitou, immobile, indifférent aux joies comme aux tristesses de la nature, semble perdu dans l’abîme de ses pensées.

Lorsqu’il lève enfin la tête et ouvre les yeux, il a tout pesé, même les choses de l’avenir que son intelligence a le don de pénétrer. Il a pesé les destinées de l’homme, car il a enfin décidé de faire un animal spirituel. Devant son esprit clairvoyant ont passé les races et les tribus humaines ; le mal en lutte contre le bien : l’un défaisant ce que fait l’autre ; le Grand-Serpent dont la colère cause le déluge ; Michabou qui en répare les désastres, restaure l’humanité, sauve les animaux qui repeupleront la terre, enseigne les arts à Michillimakinac ; Kabéoun luttant contre son fils l’homme-manitou ; les exploits du Windigo ; les migrations des Algonquins et leurs guerres avec les Iroquois. Mais il a prévu aussi que tout le mal viendra de la créature à laquelle il travaille et que, s’il lui donne la vie, elle peuplera la terre de mauvais manitous.

Que va-t-il faire ?

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