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le paradis perdu

fruits, sa nourriture ordinaire, et les dépose sur le même gazon, en face de la fontaine.

Là maintenant, assis tous deux, comme fêtes par le sourire des fleurs et la musique des oiseaux, mêlant les aliments célestes à ceux de la terre, ils prennent ensemble le repas symbolique des engagements de l’hyménée.

Tout heureuse qu’elle est, Atta ne peut dissimuler complètement une secrète inquiétude. Trop expressifs sont ses yeux pour ne pas trahir ses sentiments au regard pénétrant d’Agohao. Au reste, elle voit bien qu’il la devine et prépare même, par de délicates questions, la voie aux plus intimes confidences, et cela ne fait qu’augmenter son trouble.

Un moment arrive où l’impression produite sur son époux, par sa figure irrésistiblement pensive et ses regards distraits, ne lui permet plus de prolonger ses réticences. À voix basse, un peu altérée, elle lui apprend enfin que l’hymen lui a été défendu par le Roi du ciel et le Maître de l’univers, Taronhiawagon.

Atta parle encore, lorsque Le-Loup voit apparaître derrière elle un être majestueux, formidablement grand, à l’air courroucé. D’une main puissante, Taronhiawagon, car c’est lui, saisit la coupable, et, avant qu’elle n’ait le temps de pousser un seul cri de détresse, en présence de son époux paralysé de surprise, il la lance en bas du ciel et disparaît.

Comme réveillé par un songe effrayant, Le-Loup