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en mocassins

Les yeux éblouis d’Agohao voient nettement l’être céleste, sa figure délicate au teint feuille-morte, plutôt clair ; sa chevelure noire à reflets bleus ; sa robe blanc-de-nacre, ornée de dessins en plume de colibris ; ses mocassins brodés de perles ; son triple collier, ses bracelets et sa ceinture, en porcelaine brillante ; son urne rose, incrustée d’anogny mauve.

Les yeux de la femme d’un éclat ravissant, Le-Loup a juste le temps de les voir, car, à l’aspect de cet étranger, elle les baisse aussitôt avec une modestie qui ajoute encore à sa beauté. Visiblement surprise, un peu confuse, elle n’est cependant pas effrayée, car l’appréhension du danger, inconnue au Paradis, n’en peut ternir le bonheur.

Ce n’est pas sans effort que l’habitant des mers peut maîtriser son émotion. Sans doute qu’en face de cette beauté, il se sent plus fier de son exploit ; mais le brillant costume qu’il admire, le rend un peu confus dans ses habits de loup-marin encore souillés de limon. Il se ressaisit néanmoins et, d’une voix solennelle et douce, s’écrie : « Qu’elle est belle, Être céleste, la lumière qui t’éclaire ! N’es-tu pas la femme dont j’ai entendu les oiseaux louer la merveilleuse beauté ? Dis-moi ton nom, afin que je sache si je dois croire mes yeux ou si, jouet d’une illusion, je ne vois pas un délicieux fantôme créé par la malice des esprits. »

D’une voix musicale et de l’accent huron le plus