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LE WINDIGO.

Je suis le Windigo, ne crains ni dieux ni diables,
Et marche par les bois, la tête dans les cieux.
J’ai mauvais œil ; mon souffle effarouche les sables ;
Ma main distraite arrache, en passant, des érables ;
Et je traîne le vent que fouettent mes cheveux.

Géant et manitou, je saute les vallées,
Et fais, dès que je cours, les ouragans jaloux.
Sous mon galop je vois des oiseaux par volées,
Des troupeaux de bisons et des plaines gelées
Où j’écrase des loups.

J’entends des cris plaintifs au fond de la tempête
De terre et de débris que soulèvent mes pas.
Une rapace gent m’accompagne et me fête ;
Je laisse les vautours se poser sur ma tête
Et s’arracher entre eux mes restes de repas.

Je me baigne en un lac et la côte s’inonde ;
J’enfourche une montagne et j’allume aux éclairs
Mon calumet ; je dis à la foudre qui gronde :
Cousine, à moi les monts et la terre féconde ;
Je te laisse les airs.