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les algonquins

tume ; mais au moins serait-elle habillée, et l’habit simplement correct, sans changer la beauté du sujet, peut souvent la mettre en relief.

Je vais donc, dussé-je ne pas réussir, mettre en vers trois autres chants, mais sans rien ajouter ni retrancher de subtantiel au fond dont la poésie ne laisse rien à désirer.

LA CHANSON d’ARSELIK

Bien que l’amour joue un grand rôle dans l’inspiration de ce chant, il s’y montre noble, énergique, sans molle tendresse et rehaussé en quelque sorte par la poésie de la nature et de la mythologie.

Une jeune Abénaquise nommée Arsélik est perfidement conduite et abandonnée dans une île déserte, par deux rivales que dédaigne son amant. Là, voyant le canot qui l’a amenée s’enfuir, elle chante ainsi[1] :

Je pleure seule dans cette île,
Et nul n’entend ma voix… Quel sort !
Ô solitude où l’on m’exile,
Entends au moins mon chant de mort !

Seule, ainsi la bête sauvage,
Et captive au milieu des eaux,
Je vais mourir sur ce rivage
Où le temps blanchira mes os.


  1. Voir « Some Wabanaki Songs » by John Read, dans le Rapp. de la Soc. Roy. 1887, vol. V, sec. II.