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PASSAGE DE L’HOMME

peu. Des pas, pourtant, traînaient encore près de l’étable. Je collai mon oreille à la fenêtre de ma chambre. Deux femmes s’entretenaient à mi-voix, et l’une disait : « Il faudrait mettre le feu à leur maison. Les sorciers et les sorcières, on les brûlait bien autrefois ! Et alors, on serait délivrés. » L’autre, qui semblait n’avoir pas entendu, reprit sur un ton lamentable : « Est-ce qu’on va tous mourir comme ça ? Qu’est-ce qu’on a donc fait au Bon Dieu ? »

Deux jours après, ce fut l’histoire de la faucille. Cette histoire-là, vous la savez peut-être. Non C’est une histoire pourtant qu’on vous raconte toujours, une histoire même qu’on a écrite, à ce qu’on m’a dit, en plusieurs langues. L’Homme était parti dans les champs. Au petit jour. C’était son habitude à lui. Il était à une lieue de la maison, sur la colline, par le flanc droit de la colline, à cet endroit où commence la Grand’Lande, lorsqu’un homme se jeta sur lui, qui était là, caché derrière un arbre, avec une faucille à la main. L’Homme était fort et la faucille changea bientôt de main. Le Fossoyeur, car c’était lui, fut proprement étendu sur la terre, et maintenu par le genou de l’Homme. Et l’Homme lui dit (c’est le Fossoyeur qui le raconta), et l’Homme lui dit : « Et si je vou-