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PASSAGE DE L’HOMME

Iles qui m’a guérie. » L’Homme lui demanda bien, pourtant, de réfléchir avant de parler, et de comprendre que c’est Dieu qui l’avait guérie, que la « Chose des Iles », ce n’avait été pour elle qu’une invitation à la prière, — oui c’est bien les mots qu’il disait — Christiane n’en continua pas moins à dire que la « Chose des Iles » l’avait guérie, que l’Homme était un magicien, qu’il pouvait tout ce qu’il voulait. C’était une fille toute simple, et il n’y eut pas moyen de lui faire entendre raison.

Et il n’y eut pas moyen de faire entendre raison à personne. Ils voulaient tous que l’Homme fût un magicien. Ils avaient tous besoin d’un magicien. « Oui, disaient-ils, l’Homme est meilleur que nous, ah ! bien meilleur ! Et c’est quelqu’un qui vous guérit ! »

Des guérisons, il y en avait de plus en plus. Après Christiane, ce fut la vieille des Prés d’En-Bas, la petite fille de Nez-Tortu, et le gros meunier des Trois Granges, et Jacques le Long, et d’autres encore, que je ne me rappelle plus, et même des bêtes. Et l’Homme ne se dérangeait pas. Il faisait tout pour qu’on ne crût pas en lui, pour qu’on n’eût pas recours à lui, mais on lui volait les choses mêmes qu’il avait taillées. Et elles allaient de mains en mains, avec chacune sa vertu en