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XXIV


Nous attendîmes deux mois encore, jusqu’à ce que vînt la première neige, une petite neige légère et douce, qui semblait devoir s’arrêter, et qui pourtant tomba des jours entiers, et alors l’Homme nous arriva.

J’étais toute seule dans ma maison, à ravauder des bas devant la cheminée. C’était cinq heures. J’allais fermer la fenêtre pour allumer la lampe lorsqu’il se dressa devant moi. C’est à peine si je le reconnus. Le même visage, mais travaillé, fatigué, tout creusé par les voyages et le chagrin, les tempes blanches, et un air las, avec, pourtant, une lumière au fond des yeux.

« Geneviève, ne dis rien à personne ! » Sa voix aussi était changée, plus lourde, une voix qui ne savait plus chanter. Il entra et s’assit près de moi. « Quelqu’un des Iles, Geneviève, dit-il, oui, je devais t’amener quelqu’un des Iles, tu te rappelles ? Et je suis seul. » Il était là, et j’étais heureuse qu’il fût