Page:Groulx - Mes mémoires tome IV, 1974.djvu/246

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XI

DEUX AUTRES DEUILS

Mort de Mgr Philippe Perrier

Deux grands deuils en cette année 1947 et qui se suivent de très près. Mgr Philippe Perrier s’éteint trois mois à peine après le cardinal Villeneuve. La veille, je passe une partie de la soirée avec lui. Il est hospitalisé à l’Hôtel-Dieu de Montréal depuis quelques jours. Il doit subir une assez grave opération le lendemain. Mais je le trouve d’excellente humeur, d’un moral parfait, allongé sur une chaise longue, et naturellement un livre à la main. Nous parlons peu de son opération qui lui paraît simple incident. Malheureusement, m’a-t-on dit, ses chirurgiens qui devaient l’anesthésier, décident, la veille au soir, de procéder par injection rachidienne. L’opération réussit merveilleusement comme toujours. On avait compté sans l’affection cardiaque dont souffrait Mgr Perrier. On fut incapable de lui remonter le cœur. Il mourut la journée même de son opération.

Il n’avait que 77 ans. Il restait encore vigoureux de corps et d’esprit. Il n’était pas au bout d’une vie restée féconde. Dans un article au Devoir, paru le 26 avril 1947, j’ai raconté la secousse que m’apporta cette mort et l’émoi qu’on en ressentit. Il y a de ces morts qui vous laissent devant un grand vide que nul, nous semble-t-il, ne saurait combler. Quelques mois tout au plus auparavant, j’avais prêché, sur l’invitation de l’Archevêque, au jubilé d’or sacerdotal du grand vicaire, à la cathédrale de Montréal. Je me sentais heureux de rendre hommage à un homme, un de ces hommes rares que l’on peut pleinement estimer. Je