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quatrième volume 1920-1928

Le délégué essuie ses pleurs.

Dans ce même mot d’ordre, la revue avait pris la peine d’ajouter :

Pour le reste rien ne sera changé ni à l’esprit ni à la direction de la Revue, non plus qu’aux multiples services de notre œuvre…

J’abandonne la direction

Rien, en effet, ne paraissait changé pour le moment. En février, en mai, en juillet 1928, je collabore encore à la revue. En janvier et en février, Jacques Brassier rédige toujours « La vie de l’Action canadienne-française ». Mais à partir de cette date, la chronique mensuelle passe à un autre et sous un titre nouveau : « L’Âme des livres ». Je viens d’abandonner la direction de L’Action canadienne-française. On a quelque peu épilogué sur ce petit événement. D’aucuns ont cru y deviner une intervention de l’autorité épiscopale. En séjour, à l’été de 1928, à l’évêché de Saint-Boniface où je suis allé me documenter sur la question des écoles du Manitoba, l’archevêque, Mgr Arthur Béliveau, me prend un jour à part pour me dire :

— Vous allez me raconter votre départ de « L’Action française ». Vous avez cédé à une injonction de Mgr Gauthier, n’est-ce pas ?

— Mais point du tout, répondis-je à l’archevêque, qui m’assure tenir son renseignement d’un personnage ecclésiastique du Québec.

Et je lui raconte ce qui s’est passé. J’avais promis à l’Action française de lui donner dix ans de ma vie. J’avais acquitté ma promesse, puisque, depuis 1918, j’étais officieusement et à toutes fins pratiques, directeur de la revue. Mes dix ans écoulés, j’étais revenu tout bonnement à mes travaux et à mon enseignement d’histoire, fort négligé en ces dix dernières années : enseignement qui, après tout, restait mon premier devoir d’état. J’avais donc prié mes collègues de la Ligue de me relever de mes fonctions : ce à quoi ils avaient fini par acquiescer. Je venais, du reste, de conclure