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trouvent passion trop vive pour une œuvre trop profane. Il partira fonder deux œuvres où son inlassable activité trouvera magnifiquement à s’exercer : les Retraites fermées et les Semaines sociales.

Omer Héroux

Près du Père Archambault prend souvent place un autre ouvrier de la première heure, Omer Héroux. Il s’est trouvé parmi les fondateurs de la Ligue des droits du français. Je le connais depuis longtemps, depuis son passage à La Vérité de Québec. Au journal de Tardivel, un peu vieilli, il a su donner un air de jeunesse. De Fribourg, en 1907, je lui adresse des comptes rendus de cours de vacances à l’Université suisse. L’année suivante, je le rencontre à Paris. Ensemble nous suivons le Congrès du vingt-cinquième anniversaire de La Croix. Bien des fois aussi, j’ai naguère trouvé sa signature dans Le Nationaliste, le premier Nationaliste d’Asselin. Depuis 1910, à la fondation du Devoir, il en est le rédacteur en chef. J’admire pour lors son talent de journaliste : cette façon élégante et en même temps si vivante d’exposer ou de commenter un fait. Un style direct, pas la moindre bavure, et un sens si français de la mesure. Jamais de colère ou une colère d’homme bien élevé qui frappe dur sans blesser. Un journaliste qui, avec un peu plus de vigueur, un tout petit peu, aurait pu être le premier journaliste de sa génération au Canada. Et je ne sais même s’il ne l’aura pas été. À mon arrivée à Montréal et dès l’inauguration de mes cours d’histoire, il s’est fait de lui-même mon publiciste — je l’ai écrit plus haut — et il le restera avec une fidélité jamais démentie.

Il aura été le premier directeur de la revue L’Action française. C’est lui que je remplace en octobre 1920. Il se prête de bonne grâce à me céder la place. À nos réunions, il est l’homme des nouvelles, des anecdotes. C’est par lui que nous apprenions maints dessous de la politique. Vers 1920, il nous revient souvent l’âme