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L’APPEL DE LA RACE

— En tous cas qu’il arrive le plus tôt possible, ajouta William, le cadet. Moi, j’ai hâte de partir pour notre villa d’été. Par cette chaleur, c’est à suffoquer sur le Sandy Hill. Et papa nous le décrit si beau son pays de Québec.

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Pendant que chez lui on s’inquiétait de son absence trop prolongée, Jules de Lantagnac quittait à peine Saint-Michel. Malgré la hâte de revoir les siens, le matin du départ il était reparti à travers champs, pour une dernière promenade. Il voulait condenser, humer, une dernière fois, disait-il, ses enivrantes impressions. Du reste, il avait décidé d’aller voir le Père Fabien avant de rentrer chez soi. Il se sentait obsédé par la promesse solennelle faite aux ancêtres du cimetière ; il brûlait d’annoncer au religieux le terme de son évolution.

Maintenant il est sept heures du soir. Il s’en revient vers son domicile, se redisant les dernières paroles prononcées par lui, tout à l’heure, au seuil de la cellule du Père Fabien : « Vers le travail et vers la lutte ». Au moment de commencer sa vie, Jules de Lantagnac éprouve cette peur de soi-même, ce mouvement en arrière que connaissent les plus fermes, quand l’enthousiasme du rêve tombé ainsi que le rideau au théâtre antique, l’action, la tragédie commence. D’une trop noble sincérité, l’avocat n’entend point résonner sans effroi à ses oreilles le mot si grave du Père Fabien :