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LE COIN TOMBE

— Et celle-là même, interrompit Lantagnac, dis-moi, ne l’as-tu pas jugée un peu sévèrement ?

— Disons que oui, concéda Wolfred. D’ailleurs, en dehors des snobs et des salonnards, elle ne compte guère, tu sais, ni par le nombre, ni par le crédit… Donc, ma meilleure fortune, vers ce temps-là, fut de pénétrer dans les salons de quelques-uns de mes professeurs, les chefs de la jeune génération. Là, j’ai découvert ce que tu appelais souvent devant moi, sans qu’alors je le comprisse bien : la culture franco-latine, c’est-à-dire, n’est-ce pas, selon la définition que tu m’en donnais dans une de tes lettres : « la conjugaison du génie français et du génie proprement gréco-latin, mais où le premier s’est constitué l’âme pour un composé supérieur à ses parties. » La culture franco-latine, cela me parut la grâce, l’aisance dans le savoir, la vraie culture générale, tout cet équilibre, tout ce raffinement spirituel qui contrastait si profondément pour moi avec une certaine raideur pédantesque et une prétendue culture scientifique. La preuve m’était faite que rester français en ce pays est un signe d’intelligence autant qu’une noblesse. Aussi, dès ce moment, puis-je dire, c’en fut à peu près fini du mirage anglo-saxon. Comme toi, je respecte la race de ma mère ; je ne la mets plus au-dessus d’une autre.

Wolfred avait parlé avec animation, avec un feu entraînant. Son père l’avait écouté, ne l’interrompant qu’une seule fois, empoigné par l’intérêt du discours et par l’accent de cette jeune parole