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L’APPEL DE LA RACE

travail préparatoire auquel, malgré lui, il s’était livré toute la journée, rendait maintenant son fruit. La parole du député déroulait avec aisance des développements réguliers et harmonieux comme une composition classique. L’orateur avait la force d’une conscience et la clarté naturelle de sa loyauté. Il possédait les qualités qui plaisent à la fois à la Chambre et aux tribunes. Il alliait la froideur logique, l’allure savante et tempérée du débater anglais, la puissance de l’émotion, puissance contenue du Français lyrique et qui, maniée avec conviction, garde encore un étrange magnétisme sur les vieux parlementaires blasés.

Lantagnac n’avait point refait, après les autres, l’historique de la question scolaire ontarienne, pas plus qu’un exposé des droits du bilinguisme. L’élévation naturelle de son esprit l’avait vite emporté vers les sommets. Il faisait un discours d’idées générales où planait à l’aise sa pensée. Avec force il reprenait une de ses idées favorites et démontrait le danger de pareilles luttes, pour la paix du pays, pour la durée de la confédération :

« Quel but veulent donc atteindre les persécuteurs du français au Canada ? s’écriait-il, tourné vers la rangée des ministres. Veulent-ils, à tout prix, ébranler jusqu’en ses fondements l’édifice si péniblement construit il y a cinquante ans ? Je les ramène ici à l’évidence de quelques réalités : sur toute la ligne immense qui nous sépare de nos voisins du Sud, nous manquons de