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L’APPEL DE LA RACE

nelle de lui tenir lieu de ses anciens appuis. Malgré lui, un mot de Maud à peine modifié résonne constamment au fond de son coeur :

— « Non, il ne se peut pas que le devoir impose de pareilles cruautés ! ». Cette persuasion s’insinue dans l’esprit de Lantagnac, avec une force singulièrement plus pénétrante, quand il songe qu’en sa prochaine détermination, se trouvent engagés non seulement le sort de son union conjugale, mais celui de ses enfants, l’existence même de son foyer.

— Y a-t-il donc, se demande-t-il, sans jamais trouver de réponse décisive, y a-t-il» donc des cas où le devoir de la vie publique doit aller jusqu’à des sacrifices aussi sanglants ? Quand il déploie devant lui, pour y chercher des exemples, le spectacle de la vie politique canadienne, il y aperçoit toujours et partout, le règne, le triomphe si universel, si total de l’intérêt individuel, de la passion la plus sordide souvent, que son sacrifice, s’il ose l’accepter, lui paraît appartenir, en cet âge de prosaïsme brutal, à une sorte de légende dorée, démodée et presque risible.

Puis, voici bientôt que des réflexions d’un autre ordre accroissent ses perplexités. Au premier abord, il s’est défendu de s’y arrêter. Comment, en effet, les idées de William Duffin sur le péril des méthodes d’intransigeance dans les luttes des petits peuples, ont-elles pu trouver hospitalité dans l’esprit de Lantagnac ? Pourtant,