Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
PRÉPARATIFS DE BATAILLE

de votre vie aux puissances d’argent, que vous ne tenez plus compte des forces ni des délicatesses morales. Sachez qui je suis, William. Si l’on me donne à choisir entre mes honoraires et ma conscience, eh bien, je choisirai pour ma conscience. Mais je ne serai pas l’homme que l’on fera chanter, ni vous ni d’autres.

Et il fit signe à l’Irlandais qu’il eut à se retirer. Duffin bredouilla quelques plates excuses, ramassa sa serviette et sortit.

Ceci se passait le 2 mai. Le lendemain le coup monté par Duffin continua de s’exécuter mécaniquement. Mandé aux bureaux du chef de la Maison Aitkens Brothers ? Lantagnac dut avaler tout d’abord une généreuse potion de conseils sur les opportunités de la modération, puis une plainte assez mal déguisée sur les ennuis que les attitudes de l’avocat créaient à ses patrons. Au Ministère des travaux publics l’on paraissait mécontent ; on se faisait prier, on marchandait la concession de nouveaux contrats de construction. On parlait même d’en passer quelques-uns à une maison rivale.

— Oh ! qu’à cela ne tienne, avait répondu vivement Lantagnac ; je ferai en sorte, Croyez-m’en, que ces ennuis ne se renouvellent pas.

Le soir même, rentré chez lui, l’avocat, d’un cœur allègre et résolu, rédigea sa démission et la fit porter sans retard. Le lendemain il ne manifesta nulle surprise lorsque Virginia vint lui dire :