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L’APPEL DE LA RACE

Lantagnac, leva les mains pour le geste de bénir. Aussitôt il les sentit lourdes de tout le sacerdoce des patriarches, ses pères. Il lui parut qu’une atmosphère sacrée l’environnait. Très ému, à ce point que les mots faillirent lui rester dans la gorge, il mit les mains sur la tête de sa fille ; puis lentement, il prononça les vieilles et augustes paroles, celles que, ces mêmes matins, avaient prononcées avant lui tous les ancêtres de sa lignée :

— « Oui, mon enfant, je le veux bien ; mais que Dieu lui-même, non pas moi, te bénisse du haut du ciel. »

Wolfred, Nellie, William étaient là. Avec respect ils regardèrent la scène, eux-mêmes, sans doute, émus secrètement. Mais aucun ne se mit à genoux.

Lantagnac à qui revenait tout à coup le souvenir de cet échec, ne le jugeait plus avec la même résignation. La théorie du coin de fer s’offrait alors à son esprit, mais avec un sens nouveau qui le faisait trembler.

— Le coin de fer, se disait-il, ne s’enfonce pas seulement dans l’intérieur des âmes. Il frappe ici entre nous ; il est en train de dissoudre l’unité de ma famille.

Hélas ! le pauvre père savait-il jusqu’à quel point il parlait juste ? Les incidents allaient s’ajouter aux incidents et confirmer ses pires appréhensions. D’autres symptômes aggravaient à ses yeux le cas de William. Depuis qu’il pouvait vérifier son