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L’APPEL DE LA RACE

rature françaises. Parfois mademoiselle de Lantagnac monte joyeusement à la tribune, dans le rôle d’une suppléante, et trouve ses délices à faire de l’enseignement. Un jour qu’il est entré dans la chambre de sa fille, Lantagnac a été frappé de l’abondance des tableaux religieux appendus aux murs. Juste en face du petit secrétaire de Virginia, il a vu, à la place d’honneur, au-dessous du crucifix, trois médaillons légèrement encastrés l’un dans l’autre. Dans l’encadrement d’or fin il a reconnu la figure de Marguerite Bourgeoys, celle de Jeanne Mance, et, au centre, belle en son profil d’ange comme une petite Thérèse de l’Enfant-Jésus, Jeanne Le Ber. Quelques roses blanches fanées, visiblement déposées là en hommage aux trois héroïnes de la Nouvelle-France, achevaient de mourir sous le médaillon.

— Quelle joie ou quel chagrin me réserverait donc ma Virginia ? s’était alors demandé Lantagnac.

Ses inquiétudes paternelles allaient s’aviver singulièrement à cette époque, avec la venue des vacances de Noël. Quelle serait cette prochaine réunion de ses enfants, engagés eux-mêmes dans le drame silencieux de la famille ? Combien de fois Lantagnac s’est rappelé cette parole amère prononcée par Maud, le soir de leur première altercation : « Ce que vous faites, avait-elle dit, vous le faites délibérément, en me broyant le cœur, ce qui serait peu de chose pour vous ; mais vous le faites aussi, au prix de l’accord entre nos enfants ».