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L’ÉMANCIPATION D’UNE ÂME

rissable que les maladies du cœur. Entre Maud et son mari, depuis ce soir où leurs esprits se sont heurtés, le peu qui survit de leur intimité achève de mourir. À mesure qu’il fait son âme plus française, le converti peut suivre, avec effroi, l’accroissement de froideur où s’enveloppe la compagne de sa vie.

Et les enfants, comme à leur pensée il se sent de plus en plus perplexe. Virginia est la seule toujours qui lui appartienne vraiment. Prudente, discrète, elle continue de se faire, sans qu’il y paraisse, le soutien de son père. Le soir, quand il fait sa promenade habituelle sur la véranda, elle va le trouver ; elle lui raconte ses lectures, les harmonies joyeuses de son âme redevenue française. On parle ensemble du très prochain pèlerinage au berceau de la famille, chez les Lamontagne de Saint-Michel. Et Virginia exulte à la pensée des souvenirs émouvants que le paysage fera lever dans son âme. Quand le député de Russell doit parler à la Chambre, la noble enfant ne manque jamais d’aller prendre sa place dans les tribunes, juste en face de l’orateur, pour l’applaudir du regard. Que sera Virginia ? Lantagnac se le demande parfois avec une affection inquiète. Le progrès de la foi et du sentiment religieux dans l’âme de la jeune fille a été plus vif encore que le développement du sentiment français. Son grand bonheur, à ses moments libres, est de courir au couvent de la rue Rideau. Là, elle assiste aux cours de langue et de litté-