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L’APPEL DE LA RACE

ces derniers mots. Elle retrouvait là l’accent d’une volonté qu’elle savait aussi froide qu’inflexible, contre laquelle elle se buterait inutilement. Son orgueil trop fortement secoué la poussait aux excès. Elle se donna le rôle de tous ceux qui ne trouvant plus à raisonner, n’ont plus que l’issue d’aggraver leur tort. Et c’est donc d’une voix plus sèche, plus cassante toujours, qu’elle continua :

— Je vous entends, monsieur de Lantagnac, je vous entends. Vous prenez l’âme, le cœur, l’esprit de mes enfants ; le reste, s’il y en a, vous me l’abandonnez. Et cela, vous le faites délibérément, en me broyant le cœur, ce qui pour vous, sans doute, est peu de chose. Mais vous le faites aussi au prix de l’accord entre nos enfants, ce qui est tuer la paix de notre foyer.

Lantagnac fit un effort suprême sur lui-même. À cette minute, il sentit qu’un mot, qu’un geste pouvait faire sombrer tout le bonheur de sa vie, les assises mêmes de sa maison. Du ton le plus contenu, le plus attristé, il répondit donc, le front appuyé dans sa main :

— Maud, vous vous reprocherez un jour la dureté de vos paroles et l’injustice qu’involontairement, je veux le croire, vous commettez contre moi. Qui donc, parmi mes enfants ai-je violenté ? Qui a été contraint par moi d’apprendre le français ? William a voulu retourner au Loyola ; il y est. Wolfred est allé à l’Université française de Montréal ; Dieu m’est témoin qu’il