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du capital et du travail, était-il possible de mieux en dessiner l’antagonisme qu’il ne l’a fait au moyen du contraste des familles Grégoire et Maheu ? Qui oserait affirmer, qu’une profonde conviction socialiste jointe au talent de Zola, lui aurait fait abîmer son œuvre ?

Descaves, lorsqu’il a fait Sous-offs, Henry Fèvre lorsqu’il a écrit Au Port d’armes, Darien lorsqu’il a lancé Bas les Cœurs et Biribi, Hauptmann, Les Tisserands, Ajalbert, La fille Élisa, tirée du roman des Goncourt, n’ont sans doute pas voulu faire œuvre de propagande, mais ils ont sûrement voulu exprimer leur dégoût de certaines de nos institutions : leurs livres sont un cri de révolte et ils resteront.

Messieurs les partisans de l’art pour l’art, se regimbent à cet énoncé. Être compris de la foule, disent-ils, ne serait plus de l’art. Pour mériter ce nom, l’art doit rester inaccessible aux masses ; il doit continuer d’avoir un langage à lui, dont les initiés seuls ont la clef. Une idole restant toujours vaguement embrumée, dont un petit cénacle demeurerait le groupe officiant. Le vulgaire populo devant se contenter de travailler et peiner pour permettre aux artistes de continuer leur sacerdoce.

Certes, tous ne vont pas Jusque-là, tous les partisans de « l’art pour l’art » ne méprisent pas le peuple, mais c’est à cette conclusion que conduit cette théorie, et beaucoup, quoi qu’ils en aient, se croient certainement une élite bien au-dessus du vulgaire. Si tous n’aspirent pas aux privilèges, quelques-uns ne crient contre les infamies actuelles que lorsqu’elles les atteignent par ricochet.