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trompeurs, des promesses fallacieuses, des serments perfides ou donnés, en toute sincérité, dans un moment d’expansion, mais que les circonstances font, plus tard, envisager autrement ; une fois le pas franchi, il n’était plus permis de retourner en arrière ; c’en était fait pour toute la vie. Heur ou malheur, il fallait s’en accommoder. C’était tout simplement insensé.

L’indissolubilité du mariage était un idiotisme. Deux individus peuvent se plaire pendant un jour, un mois, deux ans, et arriver à se haïr à mort ensuite. Pourquoi les forcer à envenimer leur haine en les forçant à se supporter, quand il est si simple de tirer chacun de son côté.

C’est que, en dehors du préjugé religieux, le capital exigeait ce sacrifice. Les mariages, dans la société actuelle, sont le plus souvent l’association de deux fortunes — avec leurs espérances — plutôt que l’union de deux sexes. Permettre à l’association de se dissoudre, c’était le désastre pour bien des calculs, il y avait aussi la question des enfants qui compliquait la situation, non pas par l’amour que l’un ou l’autre des dissidents pût leur porter, mais par la question plus vulgaire de qui doit les nourrir.

C’est comme l’autorité des ascendants pouvant opposer leur veto aux inclinations des jeunes, n’y avait-il pas là une autre absurdité sans excuse ? De quel droit des individus qui ne peuvent plus penser ni sentir comme des jeunes, avaient-ils le droit de s’interposer dans leurs sentiments d’affection pour les entraver ? Quand on pense qu’il y a des jeunes gens qui, contrariés dans leur passion, ont encore recours au suicide, quand il serait si logique d’envoyer promener leurs Gérontes.