Page:Grave - La Société future.djvu/278

Cette page a été validée par deux contributeurs.

valeur, ont bien fait la critique du suffrage universel, proclamé le droit de l’intelligence à asservir le troupeau vulgaire de la masse. Mais ceux-là ne comptent pas en politique. Toute la pseudo-intelligence dont ils se croient doués, ne les mène qu’à être des momies du passé : nous n’avons pas à nous en occuper.

« C’est le peuple qui choisira ses mandataires », nous répondent les partisans du suffrage universel. Mais ils viennent de nous objecter qu’il ne serait pas assez mûr pour savoir se conduire lui-même ? Par quel miracle le sera-t-il devenu assez pour savoir discerner entre tous les intrigants qui viendront quémander ses suffrages ?

Nommés par le suffrage universel, les nouveaux gouvernants, — comme les actuels du reste — ne représenteraient que la moyenne d’opinions. Nous n’aurions que des médiocrités pour nous conduire, et en admettant que nous eussions la chance de rencontrer par hasard des hommes hors ligne comme savoir et intelligence, il n’en reste pas moins certain que, quelle que soit la largeur de conception de l’individu, le cerveau humain est toujours limité dans son évolution par l’évolution ambiante de son époque. Il peut être en avance sur elle, mais cette avance est des plus médiocres. Il ne peut même s’assimiler toutes les connaissances de son époque et au même degré ; il pourra être en avance pour certaines idées, rétrograde pour certaines autres. Il y a toujours des cellules retardataires, conservant dans un coin du cerveau, quelques-uns des préjugés en cours. Il y a telles idées que l’on acceptera en théorie, et devant la mise en pratique desquelles on reculera. Tels par exemple ceux qui, à l’heure présente trouvent le mariage légal