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Les collectivistes ont bien prévu l’objection, car ils se sont évertués à trouver toutes sortes de palliatifs. Mais, comme tous les palliatifs, cela complique fort inutilement le système et laisse toujours subsister le danger. Ils ont trouvé, entre autres, l’annulation périodique des bons de travail inemployés !

Mais les individus peuvent fort bien ne pas conserver leurs bons et les échanger contre des produits qui se conservent indéfiniment. Puis, où serait la raison de m’empêcher d’échanger mes anciens bons contre des nouveaux, à l’époque de leur renouvellement ? — Il pourrait se faire que je veuille travailler et accumuler dix, vingt ans de mon existence pour faire la noce ensuite, à rien produire, de quel droit m’en empêcheriez-vous ? Instituerez-vous la consommation immédiate et obligatoire ?

Mais, autre difficulté encore. Il y a des gens qui, sans intentions perverses, peuvent avoir la faculté de produire indéfiniment et y trouver leur plaisir, sans éprouver le besoin de consommer ce qu’ils produisent. Or, chaque bon de travail devra être représenté, en magasin, par son équivalent en produits ; il pourra surgir alors, dans une société soi-disant égalitaire, cette anomalie que, faute de besoins, des individus auront laissé périmer leurs bons, et qu’il y aura ainsi, en magasin, des produits inutilisés, pendant que d’autres individus ne pourront satisfaire leurs besoins, faute de produire en conséquence.

Puis, comme les commissions de statistique doivent régler la production selon les besoins de la consommation, se trouvant en présence de produits inutilisés, elles se verront, forcément, amenées à restreindre la production desdits produits. Et, de même que, dans