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autres, qu’il ne doit faire que ce qu’il juge utile à son développement.

Du côté de l’altruisme, on a dit aux anarchistes : En réclamant l’autonomie complète de l’individu, en exaltant l’esprit d’individualisme, c’est à l’égoïsme complet des individus que vous poussez, votre société ne serait pas tenable, car vous oubliez que, pour se maintenir, la société exige des sacrifices mutuels, que l’initiative individuelle doit, souvent, laisser le pas et s’effacer devant l’intérêt commun. Votre société serait le règne de la force brutale, la domination des plus forts sur les plus faibles. Ce serait un conflit permanent.

Et voilà comment on est exposé à dire beaucoup de bêtises, quand on ne regarde les choses que d’un côté. L’homme est un être complexe qui ne se meut pas sous l’influence d’un seul sentiment, mais peut être impulsé par toutes sortes de sensations, de circonstances, d’influences psychologiques, physiques et chimiques tout à la fois, sans qu’il lui soit possible de discerner sous quelle impulsion il a agi.

Si l’homme agissait sous la seule pression de l’égoïsme, la société actuelle ne subsisterait pas une seule minute, car, exigeant les plus grands sacrifices de la part de ceux qui sont dépossédés de tout, quand sous leurs yeux s’étale le luxe des riches, il a fallu à ces derniers faire vibrer d’autres sentiments pour en obtenir la force qui soutient leur système, et qu’ils auraient été impuissants à défendre s’ils en avaient été réduits à leurs seules forces.

D’autre part, ils se trompent ceux qui viennent nous prêcher le sacrifice et l’abnégation, car s’il peut arriver à l’homme de s’oublier lui-même pour venir