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BON FAIT VOLER BAS

roit. Et chacun d’eux dit voir (vrai) ! Honni soit celui par qui il demeurera que tous les gentilshommes ne soient détruits ! Lors se assemblèrent et s’en allèrent, sans autre conseil et sans autres armures, fors que de bâtons ferrés et de couteaux. »

L’orateur véhément qui avait si bien devisé, parlé si voir et si haut, et, à vrai dire, déterminé l’insurrection, s’appelait tout simplement Guillaume Caillet. Il n’était ni plus ni moins malheureux que les autres paysans du Beauvoisis. Les routiers des grandes compagnies ne lui avaient point mangé plus de blé qu’au premier venu, ni plus ravagé son champ, ni mis à plus mal sa femme ou ses sœurs. Mais Guillaume Caillet avait toujours eu la tête plus près du bonnet qu’aucun des manants de sa paroisse.

Tout enfant, — qu’importe le titre de la chronique où nous puisons ces détails ? — il aspirait à dominer ses égaux ; à courir plus vite que les plus agiles ; à lutter contre les plus robustes ; à servir la messe du curé de préférence aux plus clercs ; à tenir l’étrier de Monseigneur, si par hasard les pages de Monseigneur n’y mettaient ordre.

Nombrer les tordions, les nasardes, les ruades, les étrivières, les gaulées, que lui valut son amour immodéré de la gloire, serait une opération arithmétique dont la patience de nos lecteurs ne nous permettrait pas de venir à bout ; nous la leur laissons à méditer.

Plus tard, Guillaume Caillet voulut être le héros des fêtes rustiques. Il lui fallait le prix de l’arbalète, le premier rôle dans toutes les cassades, la victoire à l’estoc volant, porter la bannière aux processions, être le plus renommé bouleur du pays, et aussi le plus vert galant et le meilleur