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SEINE-ET-MARNE

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Relief du sol. — Le dép. de Seine-et-Marne n’a rien de houleux, de puissamment tourmenté et il se présente sous forme d’un plateau plus ou moins raviné, plutôt que sous celle d’un pays de collines ; encore moins est-il montagneux. Aucun coteau n’y monte au-dessus de 215 m., altitude de la butte Saint-Georges, altitude d’un mamelon du N.-E. entre la Marne et son affluent de g. le Petit-Morin, à la frontière même de l’Aisne, au N.-E. du village d’Hondevilliers. Quelques autres protubérances dépassent 200 m., mais en petit nombre, et la plupart se tiennent au-dessous de 150 m. De ce culmen de 215 m. au lieu le plus bas de Seine-et-Marne (32 m.), qui est l’endroit où le fleuve de la Seine abandonne le territoire, l’échelle des altitudes n’est donc que de i83 m. Ce u’est pas à dire que le pays soit absolument banal ; il s’en faut de beaucoup, car s’il s’étend en plateaux monotones, il est creusé de profonds et pittoresques vallons, ou sillonné de riches, d’opulentes vallées, ou ombragé de forêts. Dans l’ensemble se détachent la Brie, le Gâtinais, la région des grès de Fontainebleau.

La Brie occupe tout le N. et tout le centre du territoire et, en somme, à peu près toute la contrée, sauf l’arr. de Fontainebleau, dans le S. extrême. Cette Brie est proverbiale par l’opulence de ses moissons, la bonne tenue de ses fermes, les soins minutieux qu’on y apporte à la culture du sol ; avec sa commère, la Beauce, elle coutribue pour une grande part à nourrir le dévorant Paris. C’est une des régions essentielles du bassin de Paris (du bassin géologique, s’entend). Cet ancien Briëgus sâltus, dont le nom viendrait, croit-on, du celtique brick, autrement dit l’argile, ne s’étend pas seulement en Seineet-Marne, mais c’est ce département qui en détient la plus grande part, beaucoup plus que Seine-et-Oise, Seine, Aisne, Marne et Aube. Un la divisait géographiquement en Haute-Brie, Basse-Brie et Brie Pouilleuse ou Galvèse, relativement infertile, ce que le mot pouilleux signifiait dans le vieux français ; et administrativeinent en Brie française et en Brie champenoise. La Brie de Seine-et-Marne était Brie française, et, à l’autre point de vue, elle formait la Haute-Brie et la majeure part de la Basse-Brie. La Brie de Seine-et-Marne, plus plate que la Brie champenoise, est une surface d’argiles empâtant des meulières et reposant sur un calcaire de 6 in. d’épaisseur au plus, dit calcaire de Brie ; sous ce calcaire s’étendent tantôt des gypses perméables, tantôt des marnes imperméables : là ou c’est le gypse, la Brie laisse couler ses eaux dans la profondeur, à travers meulières de Brie, calcaire de Brie, et le dit gypse ; et alors les rus de surface tarissent, les pluies s’infiltrent, et le tout va sortir par des fontaines dont l’une, celle de Chailly, dans le val du Grand Morin, est l’une des plus puissantes du bassin de la Seine ; là où c’est la marne, les eaux ne « s’effondrent pas », le sol reste humide : « ce qui explique la présence, sur beaucoup de points, de longues lignes de peupliers et de grandes maies entourées de roseaux, de saules et de prèles ».

I.a Briè, lit-on dans une description assez concentrée, ■< la Brie, reine des blés, s’étend presque jusqu’aux portes de Paris, entre la Seine tortueuse et la Marne plus errante encore : un village qui n’est qu’à 14 lui. de la place delà Bastille, Sucy-en-Brie, lui doit son surnom. Si près de Lutèce par son terme occidental, des millions d’hommes connaissent cette plaine de 622.000 hect. (toute Brie comprise), plus ou moins bosselée : de nom seulement, ou pour l’avoir traversée en wagon, de Paris à Melun, de Paris à Brie-Comte-Robert, de Paris à Provins, de Paris à Coulommiers, et pour avoir fugitivement vu sa plaine admirablement labourée par des attelages de forts chevaux, ses châteaux, ses grosses fermes, ses grands domaines, ses champs d’épis superbes, et sa nudité plus souvent que ses forêts, dont cependant plusieurs sont restées vastes et belles jusqu’à ce jour. Telle est la forêt de Sénarl : elle va de la Seine à la rivière centrale de la Brie, à la ravissante Yères, petit méandre de Brunoy qu’on admire un instant du hau ! des viaducs du chemin de fer de Paris à Lyon, lente en sa prairie, dans l’ombre de deux rideaux d’arbres ; ainsi encore la forêt de Crécy, au-dessus du Grand-Moriu, autre jolie rivière vagabonde, et la forêt d’Armainvilliers, voisine de gouffres ou ruisseaux et ruisselets s’abiment ». Ces forêts ne sont pas des plus petites : celle d’Armainvilliers a 4.325 hect., celle de Crécy 4.970.

On a dit plus haut que la Brie est la reine des blés ; c’est aussi la reine des fromages et des beurres, grâce à d’innombrables vaches plus nourries du fourrage des prairies artificicielles que de celui des prés naturels : ce qui est également le cas dans la rivale de la Brie, la Beauce. Ces deux contrées se ressemblent fort, étant géologiqueraent de même formation, faites de meulières au-dessus d’un calcaire analogue, dit ici calcaire de Brie, là calcaire de Beauce. Seulement la Brie est bien plus boisée, plus amène et variée, moins aplanie ; dans les deux régions, l’eau courante est très rare sur le plateau, et pour arriver à la couche aquifère, il faut creuser des puits d’une profondeur redoutable : parfois jusqu’à plus de 80 m. sous terre dans les hauts lieux de la Brie. La Brie étant considérée comme s’arrètant à la rive gauche de la Marne ou elle a sa ville de Meaux « en Brie », la rive droite de cette rivière est commandée par les collines de rebord d’un plateau dit la Goëllo ou Goële, autour de Dammartin « en Goëlle ». Cette Goélle, aujourd’hui suffisamment nue, était une vaste forêt sous nos premiers rois, comme l’indique assez son nom, s’il est bien exact qu’il provienne du celtique Coat, la sylve. « C’est un pas de calcaires éocènes, avec ilôts oligocènes, reliant la plaine de la Brie à celles du Valois et du Parisis, et richement pourvue de marnes gypseuses ». Une chaine de coteaux la traverse, qui porte la ville de Dammartin et s’élève à 200 m. d’alt. au-dessus du village de Montgé (peut-être Mons Joris), soit à 100 m. de dominance sur le plateau : d’où une certaine majesté de montagnelte. La Goëlle se continue au N.-E., au-dessus du profond vallon de l’Ourcq, tributaire droit de la Marne, par un plateau analogue, le (Ww^ÎBn, ou revit le nom des Me 1 de uses, la peuplade celtique, puis gallo-romaine du pays : le nom de Meaux a la même origine.

A la rive droite de la Seine s’achève la Brie, commencée à la rive gauche de la Marne ; de l’autre côté du fleuve, nouveau plateau, qui s’appelle Gâtinais, et spécialement Gâtinais français (comme dépendant autre oh de l’Ile-de-France), par opposition au Gâtinais Orléanais. Le Gâtinais, coupé en deux par la jolie rivière du Loing. tributaire gauche de la Seine, est également un plateau, qui se rattache, à PC 1 ., à la fameuse Beauce. Si voisin de ces deux plaines banales, il ne leur céderait guère en banalité s’il n’était sillonné d’admirables chaines de collines de la formation du grès de Fontainebleau, si merveilleusement sauvages avec leurs empilements de rochers, leurs déserts de sable, leurs forêts de pins ; ces coteaux d’humble altitude sont réellement plus sauvages, plus grandioses que telles montagnes dix fois plus élevées, et l’on ne sau rait trop vanter les recoins farouchement pittoresques de la forêt dé Fontainebleau (17.000 hect.), des environs de Larchant, de Nemours « en Gâtinais », de Nanteau-sui-Lunain, etc. En dehors de ces grès, le plateau est absolument nu, sans hameaux, sans fermes, avec tous ses habitants dans de gros villages où il n’y a généralement qu’un puits creusé à 40, 50, 60, 70 m., sinon plus, ci qui parfois tarissent au bout de l’été ; le bétail boit à d>' grandes mares vertes, jamais à des ruisseaux — il n’y en a pas sur la haute plaine ; mais de belles fontaines jaillissent en bas, au bout de vallées sèches : de ces surgeons, le plus puissant est celui de Chaintreauville-lès-Nemours, détourné par- la ville de Paris. Pays d’ailleurs très fertile en grains, autant que Brie ou Beauce, et en somme beaucoup plus riche que tant d’autres plus variés. Cette description s’ap-