Page:Grande Encyclopédie XXIX.djvu/1100

Cette page n’a pas encore été corrigée

SERBIE

— 1050 —

ment littéraire qui n’a rien de commun avec la littératureserbe du moyen âge. A la tète de ce mouvement se trouve la république de Raguse. Au milieu du xv e siècle, elle était arrivée à un haut degré de richesse et de prospérité, plusieurs humanistes, Grecs et Italiens, y trouvèrent l’hospitalité. Il faut remarquer que la catholique ville de Raguse vivait toujours dans l’isolement moral, plus ou moins inconscient, du reste, de la race serbe. Pourtant ses écrivains se réclament de la race slovinique (slovinski), dénomination collective et impersonnelle pour tous les Slaves du Sud (Bulgares, Serbes et Croates). Ces écrivains délaissent l’italien, une langue littéraire toute formée, pour prendre comme langue littéraire le parle* serbe de l’Herzégovine, qu’ils appellent langue slovinique ou l’illyrique, et c’est dans la littérature dalmate et ragusaine que la langue serbe vulgaire est devenue pour la première fois un instrument littéraire. Dans cette littérature exclusivement poétique, il y a plusieurs noms de première importance, mais le plus grand est sans doute celui ftlva/n Goundoulitoh (1588-1688). L’épopée Osman est son œuvre la plus remarquable. Le sentiment patriotique et slave est le trait dominant de sa poésie. Parmi ses contemporains, il faut citer son parent Dïono Palmotitch, Djivo Voutehitchevitch (mort en 1658), etc. En général, la poésie épique, le drame, la comédie et la poésie lyrique ont eu de dignes représentants parmi les nombreux poètes ragusains de cette époque. Après Goundoulitch, la décadence commence. En effet, en 1667, la ville de Raguse futdétruite parun tremblement de terre et ne se releva qu’avec peine. Le poète le plus important de cotte période est J.Dyordyiteh (1675- 1737). A cette même époque, la république de Raguse donna également naissance à plusieurs érudits d’une réputation universelle. Tels sont les mathématiciens Marin Cuétalditch (mort en 1627), l’astronome R.-.I. Boskovitch (1711-87), etc.

A ce mouvement dalmate et ragusain se rattache le poète A. Katchitch Miochitch (1702-60). Son œuvre capitale, Entretiens familiers sur la nation slovinique, est un livre d’histoire populaire en vers et en prose où l’auteur a groupé l’histoire de la « nation slovinique », c.-à-d. des Slaves des Balkans. Pendant un siècle et demi, ce livre eut une vogue inouïe, et Katchitch est considéré comme un apôtre de la solidarité entre les Bulgares, les Serbes et les Croates, qui, pour lui, ne sont qu’une seule nation.

Mouvement littéraire en Bosnie et en Slavonie. Lorsque la Bosnie tomba au pouvoir des Turcs, presque tout mouvement littéraire devint impossible. Pourtant certains franciscains, au cours du xvn° et du xviii siècle, avaient composé, soit en vers, soit en prose, des ouvres de théologie et d’édification. Ils se servaient ou de l’alphabet latin ou de la boukvitza, issue de l’alphabet cyrillique. Parmi ces écrivains, les plus importants sont Mathias Divkovitch (1563-1631), et Paul Possilovitch dont l’activité littéraire tombe au milieu du xvn e siècle. Lorsque, après la paix de Carlovitz, la Slavonie se débarrassa des Turcs, il s’y manifesta aussi un mouvement littéraire. Parmi ses écrivains les plus importants il faut citer Mathias Relkovitch (V. ce nom) (1732-98), l’un des précurseurs de la renaissance serbe.

Littérature serbo-croate. — En 1690 et en 1737 eurent lieu deux grandes émigrations serbes en Hongrie. Peu après leur établissement dans la nouvelle patrie, les chefs d’Eglise commencèrent à organiser des écoles et à fonder des imprimeries. Kiev en Russie fournit les premiers instituteurs et les premiers livres (livres liturgiques et ouvrages élémentaires). Le trait caractéristique de cette influence de Kiev est son caractère religieux, et le russe, tel qu’on le trouvait dans ces livres ecclésiastiques, devint le modèle de la langue littéraire serbe. De cette façon prit naissance la langue slavo-serbe , mélange du russe ecclésiastique et du serbe. Le représentant le plus important de cette école est l’historien Jovan Raïtch (1726-80 ) (V. ce nom). Cette langue étant presque incompréhensible à la masse, l’école slavo-serbe ne répondit pas aux besoins du peuple.

En 1783, Dosithée Obradovitch (V. ce nom) publia une autobiographie, Vie et Aventures, et, en 1784, les Conseils d’un esprit sain, publications qui marquent la naissance de la nouvelle école serbe. S’inspirant des idées démocratiques, il s’adressa au peuple et lui parla en dialecte vulgaire, dont il prétendait faire l’instrument littéraire. Pourtant il n’en connaissait pas les règles, et on trouve dans ses ouvrages les traces de l’ancienne école. C’est Vouk Karadjitch (V. ce nom) né en Serbie en 1787, mort en 1864, qui opéra la réforme définitive de la langue littéraire et donna un nouveau système orthographique (phonétique) qui s’éloignait des anciennes traditions paléo-serbes et russes. Sa réforme provoqua une tempête. On n’admettait pas la langue des bouviers comme langue littéraire, et c’est seulement après sa mort (1868) qu’on proclama officiellement en Serbie la liberté complète de la réforme. Mais à cette date on se rendit seulement à l’évidence, les idées de Vouk ayant triomphé dans la littérature. La réforme fut acceptée par les Croates, de sorte que l’unification de la langue littéraire s’opéra chez les Serbes et les Croates. Parmi les écrivains de cette époque, tous plus ou moins ennemis de Vouk, les plus importants, en Autriche, sont : Loukian Mouchitzki (1777- 1837), évêquede Karlovitz, poète de grand talent et créateur de l’ode dans la littérature serbe ; Milovan Vidakovitch (1780-1840), dont les faibles romans ont eu un grand succès, même de nos jours. En Serbie : D. Davidovitch (1789-1838), fondateur du journalisme en Serbie, par lequel il exerça une influence importante sur la littérature ; Yovan Hadjitch (1799-1870), poète et polémiste, le plus intransigeant contre les réformes de Vouk ; Sima Miloutinovitch (1791-1847), auteur de la célèbre Serbianka dans laquelle il chante la guerre d’indépendance ; Ioakime Vouitch (1772-47), Yovan Steria Popovitch (1806-56), auteurs dramatiques. Ce dernier avait fondé en 1841 la Société de littérature serbe, qui devint plus tard la Société savante serbe, le premier centre scientifique en Serbie. Glasnik, le bulletin de la Société, est consacré à l’étude des antiquités nationales. Les Serbes de Hongrie ont créé en 1827 une société Srpska Matitza, qui, richement dotée, publie encore aujourd’hui le Srpski letopis (Annuaire serbe), fondé en 1825. Le triomphe des idées de Vouk dans la littérature est marqué par la poésie de Pierre Pétrovitch, prince-évêque de Monténégro (1813-51), et par celle de Branko Raditchevitch (1824-53), deux chefs du Parnasse serbe au xix e siècle. C’est ce dernier qui étendit à la poésie la réforme qui s’était déjà emparée de la prose. Dans cette période de la renaissance serbe, il y a encore quelques noms de première importance : Yovan Soubotitch (1817-86), poète et romancier ; le poète P. Preradovic (1818-72) (V. ce nom) ; Ivan Majouranitch (1814-19), poète, auteur de la célèbre épopée, Mort de Smaïl-Aga Tchenguitch ; Bogoboï Atantzkovitch (1826-56), romancier, dont le roman Deux Idoles est le meilleur de la littérature serbe ; Yakov Ignatovitch (1825-89), romancier ; L. Nénadovitch, poète (1826-95) ; S. M. Loubicha (1824-78), romancier ; Dioura Yaksitch, poète (1832-78) ; Kosta Trifkovitch (1843-75), dont les comédies accusent un grand talent ; Y. Yovanovitch, né en 1833, le plus grand poète serbe vivant ; Yovan Iltch, né en 1824 ; Mathias Ban, auteur dramatique (né en 1816) ; Laza Kostich (né en 1810) poète ; Vladislav Katchanski (1830-90). Parmi les jeunes écrivains de la Serbie, les plus importants sont : dans la poésie, Voislav Ilitch (1861-94), R. Odavitch, L. Mitrovitch ; en prose : L. Lazarevitch (1851-90), Y. Vesselinovitch, Sima Matavoul, S. Srématz, etc. Le mouvement scientifique est aussi très important en Serbie, les études historiques surtout ont pris un grand élan. A la tête de la nouvelle école historique se trouvent