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non les peuples pour les rois ; que si la haute noblesse a droit aux premiers rangs, c’est à la condition de les mériter par ses services et en se montrant sur les champs de bataille. Mais de quoi sert-il que son cœur soit resté fidèle à ces principes, s’il les trahit par sa conduite ? Fénelon avertit, invoque tous ceux dont le concours peut lui être utile pour « soutenir, redresser, élargir le prince. » Il demande pour lui au ciel « un esprit libre, soulagé, simple, décisif, un cœur vaste comme la mer. » Le duc de Bourgogne cherche vainement à s’expliquer, et il est vrai qu’il s’explique bien mal ; ses amis ont beau le défendre, Fénelon ne veut rien entendre : « Il est temps d’être homme. » Autant il avait mis jadis de longanimité à briser la violence de ce tempérament fougueux, autant aujourd’hui il met d’ardeur à en réveiller l’inertie.

Que pensait-il de lui-même lorsque, énumérant les griefs de l’opinion, il ajoutait : « Il me revient qu’on dit que vous vous ressentez de l’éducation qu’on vous a donnée » ? Se faisait-il quelque reproche ? Le duc de Bourgogne avait douze ans à peine lorsqu’il s’était séparé de lui pour aller prendre possession du siège de Cambrai. Depuis ce moment, s’il l’avait suivi de loin, comme on le voit par les plans de travail qu’il adressait à l’abbé Fleury, ce n’est que sur les études proprement dites qu’il avait conservé une certaine action. ll ne reparaissait à Paris que trois mois par an ; et un jour vint où, après les émotions soulevées par la question du quiétisme, le roi déclara qu’il ne voulait même plus entendre prononcer son nom. Le prince était resté dès lors presque exclusivement soumis à la direction du P. Martineau, à qui il rendait compte par écrit chaque jour