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un bon esprit des comédies et des romans. Il ne tolère la culture des arts qu’en raison de l’application qu’on en peut faire : pour la musique, à des sujets pieux ; pour le dessin, aux ouvrages de tapisserie. Il n’admet le latin qu’en faveur des filles d’un jugement ferme, d’une conduite modeste, qui ne se laissent point prendre à la vaine gloire. Tout ce qui est de nature à causer les grands ébranlements d’imagination, l’étude de l’italien et de l’espagnol par exemple, où les ouvrages en renom ont pour thème presque unique la description des passions, est à ses yeux plus dangereux qu’utile, et il demande qu’on y mette au moins une exacte sobriété. ll se défie surtout du savoir qui enfle et de l’instruction qui tourne au discours. « Les dames qui ont quelque science ou quelque lecture, disait-on au temps de Mlle de Scudéry, donnent beaucoup de plaisir dans la conversation et n’en reçoivent pas moins dans la solitude, lorsqu’elles s’entretiennent toutes seules. Leur idée a de quoi se contenter, pendant que les ignorantes sont sujettes aux mauvaises pensées, parce que, ne sachant rien de louable pour occuper leur esprit, comme leur entretien est ennuyeux, leur rêverie ne peut être qu’extravagante. » Les discours de ces savantes ne valent pas mieux aux yeux de Fénelon que les extravagances des autres. Il n’espère rien de bon d’une éducation qui porte au dehors, pour ainsi dire. « Qu’une femme ait tant qu’elle voudra, dit-il avec une sorte de rudesse, de la mémoire, de la vivacité, des tours plaisants, de la facilité à parler avec grâce : toutes ces qualités lui sont communes avec un grand nombre d’autres femmes fort méprisables ; mais qu’elle ait un esprit égal et réglé, qu’elle sache réfléchir,