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que, portant un dernier coup à la doctrine de Rousseau sur le développement excessif de la sensibilité et la prépondérance de la passion, elle définissait le bonheur l’intérêt dans le calme.

IV

L’esprit de chimère ne la trouve pas moins armée de bon sens. Ses vues d’ensemble sur les principes de l’éducation sont larges, souples, absolument opposées à toute idée de système. C’est par là d’abord qu’elle rompt avec les utopies de Rousseau.

Conformément à ses habitudes de suite et d’enchaînement, Mme Necker concevait l’éducation comme une œuvre qui se prolonge ; elle y distinguait quatre « modes » progressifs : l’éducation de l’enfance que l’on reçoit, l’éducation de l’adolescence ou de la première maturité que l’on se donne, l’éducation de la seconde maturité que fournit le monde, l’éducation de la vieillesse qui achève et couronne toutes les autres. Dans l’éducation de l’enfance, renouvelant à sa manière les prescriptions de Fénelon et de Mme de Maintenon, elle combattait l’uniformité des moyens : les maximes communes lui semblaient «  des habits pris à la friperie, toujours trop longs ou trop courts pour la taille de ceux auxquels on les ajuste » ; elle se moquait des pédagogues « qui se prosternent devant leur idéal comme font les tailleurs devant leur modèle. » À son avis, une des grandes causes du peu de profit que produit l’instruction, c’est «  qu’on n’offre pas aux esprits le genre d’idées qui leur convient » ;