Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/289

Cette page n’a pas encore été corrigée

en parlant de l’air glacé de ses enfants, lorsqu’il les admet en sa présence. Ils ont leur place partout, ou partout la prennent, parfois même avec une assurance qu’on est obligé de réprimer : à la table, aux jeux, aux conversations. Dans la peinture que nous a laissée Diderot du salon de l’Ermitage, ils sont le fond du tableau. Les plus jolies scènes que Mme d’Épinay reproduit elle-même dans ses Mémoires sont, comme nous dirions aujourd’hui, des scènes d’intérieur, celles où elle se représente entre Louis et Pauline, recevant leurs lettres écrites sur la terrasse et leur répondant de la chambre voisine ; provoquant, après le dîner, leurs confidences sur les occupations de la journée, ou préparant une solennelle séance d’examen. Son vœu le plus cher aurait été qu’ils retrouvassent plus tard la Chevrette telle qu’ils l’avaient connue dans leur enfance, sans modification ni embellissement d’aucune sorte, afin d’y retrouver en même temps toute la fraîcheur de leurs premiers souvenirs. C’est en s’occupant d’eux que Grimm a achevé de conquérir son cœur. Pour eux, elle est prête à toutes les abnégations. Si elle s’est laissée entraîner dans les opérations de Terray, c’est qu’elle y avait cru voir un moyen d’augmenter le bien-être de sa fille ; et le souci de l’indépendance qu’elle lui assurera est un des derniers qui l’occupent. Toute jeune encore, et alors qu’elle n’avait à attendre du monde que des succès d’amour-propre et de sentiment, elle s’était résolue à un sacrifice toujours difficile et rare : le sacrifice de soi-même ; elle s’était faite institutrice. La mode n’était-elle pour rien dans cette ferveur d’éducation ? Nous trouverons tout à l’heure dans quelques-uns des traités de Mme d’Épinay la trace des engouements du jour. Mais