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Aumont, qui y avait une chambre, la lui prêta ; et pendant quelque temps elle lui donna tout ce qui lui était nécessaire, jusqu’à des habits ; « mais elle le fit savoir à tant de gens, qu’enfin la veuve s’en lassa, et, un jour, elle renvoya par une charrette le bois que la maréchale avait fait décharger dans la cour du couvent. » Sa réputation la sauva. La malignité ne l’avait pas épargnée durant qu’elle tenait le salon de Scarron, ni depuis sa mort ; et l’on sait que la Princesse palatine et Saint-Simon recueillirent plus tard, sans en laisser tomber aucun, les propos qui coururent alors sur sa galanterie. « Ceux qui me déchirent, disait-elle aux Dames de Saint-Cyr, ne m’ont point connue, et ceux qui m’ont connue savent que j’ai vécu sans reproche avec ce monde aimable qu’il est difficile de voir sans danger. » C’est le témoignage que lui rendaient « les honnêtes gens » et Bussy-Rabutin lui-même, qui exaltait « sa glorieuse et irréprochable pauvreté. » Ne s’évitant aucune démarche, n’en faisant aucune qui pût compromettre « sa gloire, » elle attendit que des amis, le maréchal de Villeroy, le maréchal d’Albret, le baron de la Garde, lui vinssent en aide. On parla à la reine de « cette jeune femme belle, vertueuse et de beaucoup d’esprit, que la misère pouvait réduire à de grandes extrémités. » « Touchée de cette bonne conduite, » — le mot est des Dames de Saint-Cyr, — Anne d’Autriche lui accorda une pension de deux mille livres (1661).

Mme Scarron quitta aussitôt la Petite Charité pour entrer aux Ursulines du faubourg Saint-Jacques ; c’était le couvent où elle avait prononcé son abjuration. Elle y retrouva le repos et presque le bonheur. Mme de Caylus