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contre l’impiété ! Respect, adoration, soumission, anéantissement devant le saint-père.

Le moine leva ses deux bras et resta longtemps dans cette posture ; il semblait s’offrir en sacrifice pour expier la coupable opinion de tous envers le saint-père.

— Qu’avez-vous donc, Ulrich ? dit avec impatience et en se retournant vers son fils le graf Eberstein, vous ne tenez pas en place. Pourquoi cette agitation ? Ne croiriez-vous pas ce moine, quand il témoigne de son respect pour le saint-père ?

Le fils du graf rougit et perdit un peu contenance ; il répondit pourtant :

— Ce n’est pas cela, mon père. Je me suis penché en avant pour m’assurer si ce moine n’est pas celui qui, pendant quelques mois, j’étais bien jeune alors, m’a enseigné les premiers éléments de mes études. Il m’a semblé le reconnaître.

Devenu l’avocat du pape, le moine rendit son rôle plus hardi : Combien laissait-il supposer son ennemi bas à terre pour faire preuve, lui moine, de générosité ? Sur le ton simple de la conversation, il reprit :

— Monseigneur Pandolfi n’est pas infaillible. Lui non plus ne sait pas ce que les moines, ses inférieurs, se permettent en son nom. Et parmi les moines il y en a d’avides : tous les dominicains ne sont pas saint Dominique. Un seul peut-être est cause de ces actes de simonie. À celui-là vous ne sacrifierez pas les autres. Il y a plus : vous n’en poursuivrez aucun même mentalement, frères en Jésus-Christ ; car celui que vous auriez désigné à la vengeance serait peut-être le moins coupable, songez-y bien !