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célèbre sous la plume de Byron. Tous les genres courent s’abreuver à une même source, quand elle offre cette universalité mystérieuse, fort difficile à expliquer. Peut-être n’y a-t-il pas d’écrivain, pas de poëte, pas de peintre, pas de musicien, peut-être n’existe-t-il que des sujets.

Du second au troisième acte, madame Ervasy ouvrit la porte de sa loge et roula son fauteuil. Dauphin était debout dans le corridor, à un pas de la porte. Il était vraiment remarquable par sa magnifique ténue. Tous ceux qui passaient près de lui n’arrivaient pas à la hauteur de ses épaulettes neuves, étincelantes comme celles du général Amoagos, dans la grande et belle comédie de Vautrin. Les ouvreuses étaient muettes d’admiration. Quel dommage, pensaient-elles, que cet homme ne soit pas maréchal de France ! Il y en a plus d’un qui ne le vaut pas.

— Dauphin, lui demanda madame Ervasy, de quel pays êtes-vous ?

Avant de répondre, le beau chasseur ôta son chapeau à plumes de coq, et le passa, en deux mouvements presque militaires, sous son bras.

— Madame me fait l’honneur de me demander…

— Le pays où vous êtes né !

— À Clichy-la-Garenne, madame.

Et moi qui le croyais Bavarois, pensa madame Ervasy, en tombant sur cette déception : un Allemand de Clichy-la-Garenne !

— Vous n’avez pas toujours été chasseur ?

— Non, madame, je ne l’étais pas en naissant.

— Je le suppose, dit madame Ervasy, en souriant. Je