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— Vous m’avez déshonoré ! dis-je alors à votre gendre, je ne veux plus demeurer chez vous.

— C’est ce que je voulais vous faire dire, me répondit-il : sortez !

— Tu as eu tort, dit Richomme à Fournisseaux, ne voulant pas d’abord justifier la conduite révolutionnaire de son ancien commis ; mais je n’approuve pas non plus mon gendre d’avoir été si fier avec toi. Pour ma fille, qui, j’en suis sûr, a été affligée de cette scène, tu aurais dû te contenir, Fournisseaux ; ce n’est pas elle qui aurait voulu te faire cet affront.

— Vous la connaissez bien, monsieur Richomme ; et je ne vous ai pas tout dit. Savez-vous ce que j’ai trouvé le soir, en rentrant dans ma chambre, le cœur encore tout gros de ma honte ?

Fournisseaux enfonça la main dans son gousset.

— J’ai vu reluire ceci sur ma table : une montre en or, qui sonne les heures comme un ange, avec ce compliment gravé sur la boîte.

M. Richomme lut à haute voix et avec une vénération tendre : Offerte par l’ancienne maison du Balai d’or à M. Fournisseaux : témoignage de reconnaissance.

Je t’aime, ma fille ! je t’aime ! s’écria Richomme en rendant à Fournisseaux sa montre d’honneur. Voilà le sang ! le bon, le vrai sang des Richomme. Avoue, vieux Fournisseaux, que la réparation a été complète. Le cadeau de ma fille veut dire qu’elle me remplace auprès de toi, comme amitié, comme générosité et comme justice. Tu n’as plus rien à dire, tu n’as plus le droit de te plaindre, et je te répète maintenant, avec plus de force encore que