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riot, son gendre, lui avait fait l’énumération. Chaque partie eut de lui son mot d’admiration ; il ne lui restait plus qu’à gravir un tertre boisé de sapins, et de petits cèdres, placé au milieu du parc et si bien situé, qu’on découvrait de son sommet fleuri une vaste étendue de campagne et le cours du fleuve. Il faut voir cela, se dit Richomme, quoique un peu las de ses explorations. Là serait son belvédère ; il y bâtirait un pavillon chinois où les amis trouveraient, l’été, au milieu de la chasse, de l’eau de seltz, du vin blanc, de la bière, de l’ombre, de la fraîcheur, d’excellentes lunettes d’approche pour s’amuser à voir naviguer les bateaux à vapeur, des livres, un peu plus gais s’entend que ceux du dernier locataire, et un divan tout autour du charmant asile. Ainsi raisonnait M. Richomme en escaladant, à l’aide de sa canne et de tous les troncs d’arbres possibles, le monticule dont il s’inspirait. Enfin il atteignit au sommet, et que voit-il ? Une tombe ! quatre cyprès ! une épitaphe ! Une tombe ! Cette découverte l’anéantit. Son belvédère était un cimetière ! Quelle sinistre surprise ! Dès lors il s’expliqua avec une douloureuse facilité pourquoi le dernier locataire avait affiché les signes non équivoques d’un deuil profond aux murs, aux meubles, aux tentures de sa demeure. Que faire de cette tombe sur laquelle il lut, aux derniers rayons du jour : Ci-gît, sous cette humble pierre, une épouse adorée, morte au printemps de son âge : louange à ses vertus, respect à sa tombe. Respect à sa tombe, murmura Richomme ; il faut donc qu’on n’y touche pas ! Comprend-on un tel embarras ? Et moi, ajouta-t-il, qui suis venu chercher ici des idées dégagées de tristesse ! ceci