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pied, que j’aie ôté mes gants blancs avant d’entrer, que je me sois fait petit peuple, boutiquier détaillant, pour manger les votes dans la main des électeurs ? Comme tu me vois. Tout en noir, en gants blancs ; mon cabriolet à la porte.

— Raconte-moi cela, dit aussitôt Lucette en soufflant sur les deux bougies placées sur le piano.

— Pourquoi éteins-tu ces bougies, mon amie !

— Mais par économie, mon ami : puisque la lampe est allumée, à quoi bon les bougies ? nous y voyons assez pour causer.

— Soif ! dit Fleuriot en se mordant les lèvres. Il reprit : J’ai d’abord rendu visite aux électeurs de la rue des Lombards. Quelles excellentes gens ! Heureusement je me suis présenté le premier ; car, entre nous, je crois qu’ils sont pour le premier venu. Leurs femmes, surtout, m’ont parfaitement accueilli. Notre maison, les émerveille. Ils sont au courant des embellissements, qu’ils louent outre mesure, — pour être invités à dîner, sans doute. Je ne saurais te dire celui que j’ai trouvé le plus facile à ma proposition de les représenter. Ils adhéraient à tout ce que je disais. « Mais comment, monsieur Fleuriot, — je te répète ici leurs propres expressions, — nous sommes tout à vous. Vous nous faites vraiment trop d’honneur en prenant la peine de passer chez, nous pour si peu. Vous n’aviez qu’à nous écrire deux mots, et votre but aurait été rempli. » Là-dessus, je remerciais, et je sortais accompagné de leurs politesses et de leurs saluts jusqu’au milieu de la rue. Voilà l’histoire de presque tous les marchands en boutique. Les troisièmes et quatrièmes étages étaient plus rudes, non à cause de