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le dragon rouge.

— Où puis-je l’avoir perdue ? se disait Marine. L’ai-je reprise des mains du moine ? Je ne puis me rappeler… Je retourne à Saint-Maur…

Marine allait sortir lorsqu’on frappa à la porte de la chambre. Elle ouvrit ; c’était un domestique.

Par la porte entr’ouverte, il dit, avec la mauvaise humeur d’un homme dérange dans son sommeil : Un homme, un paysan, je ne sais qui, veut voir madame.

— Qu’il entre, dit la marquise.

L’homme entra.

— Madame la marquise de Courtenay ? demanda-t-il.

— C’est moi.

— Vous n’êtes pas seule…

— Laisse-nous, Marine.

Marine se retira.

— Prenez, madame, dit le paysan, dès que Marine fut sortie ; ceci est pour vous.

Le paysan sortit aussitôt.

C’était une lettre qu’il avait remise à la marquise, c’était celle qu’avait écrite la marquise, elle-même, celle que Marine avait oubliée ou croyait avoir oubliée au couvent de Saint-Maur.

La lettre avait été décachetée, recachetée ensuite.

La marquise brisa de nouveau le cachet.

Sous ces mots écrits de sa main : Si vous vivez, un signe qui me l’apprenne, il y avait une tache de sang faite avec un doigt. Le doigt avait trempé dans le sang et avait laissé son empreinte sur le papier.

— Ce sang est le sien ! Est-il vivant ? est-il mort ? Qui me l’apprendra ? Oh ! je n’ai plus de force. Oh ! mon Dieu !

Et, la tête perdue, elle ouvrit la porte qui donnait dans le cabinet où était Léonore.

Elle courut au lit de son enfant, qui dormait d’un doux et profond sommeil, et, la soulevant dans ses bras, elle l’enlaça, elle la dévora de caresses.