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LIVRE PREMIER.

tier & vigoureux, meſpriſe l’approbation de ces pigmées : d’eſprits vulgaires, qui veulent qu’on meſure leur capacité en cette ſpeculation des dons de la Muſe, ſur l’aulne de leurs rentes, de leurs qualitez, ou de leur audace à les blaſonner. Ce ſeroit peu d’aduertir cette eſpece de monde, qu’ils ne voyent goutte à telle ou telle chose dont ils le meſlent de diſcourir, ſi l’on ne leur faiſoit comprendre en ſuitte ; que quiconque parle de ce qu’il n’entend pas, n’entend rien hors de là.

Ie me ſuis aduiſée de commencer par les Diminutifs de feu Monſieur de la Nouë, puis qu’il a deuant moy pris la peine de trauailler ſur cette taſche : affin de luy reſtituer de bonne foy par ce moyen, ceux que ie ne m’eſtois peu garder d’vſurper auec luy conioinctement, en ma premiere Impreſſion, peſchant en plein canal de noſtre Langue, ainſi qu’il auoit faict. Que ſi ces meſſieurs nos Syndicqs ont fait ſi rudement le procés aux Diminutifs en mon Liure ; nos Lecteurs pourront apprendre en ce lieu par le iuſte credit du ſien, ſi ces perſonnes ont eu bonne grace de s’eſcarmoucher ſur tels diſcours : c’eſt à dire, de luy donner vn ſoufflet ſur mon nés : vſons en pareille ou voiſine occaſion, de la metaphore des Eſſais. Mais i’appris n’agueres vn plaiſant & nouuel aſſaut qu’on me gardoit pour l’anchre ſacrée : Monſieur de la Nouë, faiſant vn Liure de Grammaire, pouuoit à leur comte, traiter des Diminutifs, non pas moy, qui en produicts vn d’autre ſubſtance. Quoy vrayment, chaque Traicté d’vn Liure n’eſt-il pas vn Liure luy-meſme ? ſans adiouſter que preſques le quart dụ mien eſt compoſé de Chapitres qui regardent la Grãmaire ou ſes dependances. Voicy donc comme ce Seigneur couche les Diminutifs, & meſmes auec les apoſtilles qui ſe voyent en quelques lieux, pour le ſoin qu’il a daigné prendre de les mieux eſclaircir. Perſonnage veritablement à qui la qualité, l’eſprit, les Lettres, & l’habitude des Cours, preſtoient autant de moyen de practiquer les Loix de la bien-ſceance, & de cognoiſtre & parler la Lan-

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