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— « Quelle agréable femme ! reprit Guido. Ô Novella ! protégez-moi et aimez-moi ! »

Il s’agenouilla, baissant le front, et quand il se redressa aux derniers mots du suppliant ave, la Novella souriait, pleine de grâce et de tendresse.

— « Ainsi vous acceptez ma prière ? Merci, madone ! Daignez me recevoir comme votre fidèle, que toutes mes respirations soient des hommages à votre immaculée tendresse, à votre souveraine grâce. Ouvrez votre complaisance à l’irrévocable don de ma vie : que je sois à vous comme la pupille à l’œil qui la meut selon l’esclavage de son gré. Foulez-moi du poids béni des adorables pieds qui écrasèrent le serpent ! Que, pour l’amour de vous, ma chair soit desséchée, mes os brisés, mon sang répandu. Ah ! je vous aime, Ô Novella ! bienheureuse et bénévolente madone.

La madone accepta le pacte : un signe marqua sa volonté, son choix et son plaisir : par trois fois ses paupières s’abaissèrent sur ses yeux et par trois fois se relevèrent. Puis la nuit tomba et il parut à Guido qu’un très notable miracle avait quelques instants suspendu le soleil au bord de l’horizon.

« Il est coupable, bien coupable, se disait alors Veltro, mais il a de la piété, il regrette ses crimes, que la madone l’entende ! »

— « Écoutez-moi, seigneur, ajouta le geôlier, et sachez qu’il n’y a de meilleur recours au monde que d’implorer la Novella. Ce n’est pas pour rien allez, qu’on la nomme la Madone des Orphelins ! Ses bras sont tout grands ouverts et elle ne porte pas le