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une hallucination ou la réalité tangible d’une femme douée de chair et de jointures.

Nous nous quittions sous la voûte où s’ouvrent en vis-à-vis les égyptiennes et les assyriennes perspectives : elle entrait à droite et je continuais mon chemin. J’aurais pu entrer et la suivre, sans doute, mais les heures que je passe ici me sont sacrées : je ne travaille pas, cela est vrai, mais je pourrais travailler : je veux, du moins, garder la possibilité du devoir. Tout ce qui me reste de volonté s’est transmué en habitudes : briser le fil, ce serait résoudre la série des mouvements appris en une éternelle et buridanesque immobilité.

Tu vois que je me connais un peu. Plus je vais, plus me manque la force initiale. Je puis tout continuer, je ne puis rien commencer. Entre la volonté et l’acte, un fossé se creuse où je tomberais en essayant de le franchir : c’est une impression physique.

Finalement, la princesse surgit un jour coiffée d’un chapeau Van Dyck qui faisait de très laides ombres sur sa figure blanche : adieu ma princesse peinte par Janet. C’était une femme comme toutes les femmes et qui, décidément, ne rachetait ce défaut par aucun mérite spécial.

Voilà mon aventure.

Au fond, je trouve encore la vie assez supportable à partir de midi. J’attends le souffle, je regarde travailler, c’est une occupation, cela.

— C’est une occupation, dit Entragues. Adieu. Tu ne sors pas avec moi ?