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BRUNSWICK



27 février 1915.


Le nom de Brunswick lu dans un journal et signalé comme un camp de prisonniers français ramène mon esprit sur Stendhal, qui séjourna à Brunswick, en 1806, comme inspecteur du mobilier et des bâtiments de la couronne. Il avait vingt-cinq ans et se trouvait faire figure de maître dans un pays, hier encore ennemi, mais qui ne songeait plus à l’être. La docilité de tant de petits et grands royaumes allemands à accepter le vainqueur, ses soldats, ses fonctionnaires, est surprenante. Beyle, à Brunswick, ne trouva que des sympathies et lui-même sympathisa fortement avec les femmes du pays, sur lesquelles il donne des détails qui prouvent leur obéissance. Si je restais ici quelque temps, dit-il, j’établirais un petit sérail. Comme ces guerres de Napoléon étaient franches et honnêtes, qu’elles laissaient peu d’amertume aux vaincus ! Beyle, malgré les femmes et tout en travaillant de son métier d’intendant, s’ennuyait fort à Brunswick. Il n’en étudia pas moins les mœurs du pays,