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suivre et l’indice d’une volonté. Son immoralisme consiste à vouloir redresser cette morale faussée et restituer à la vie son importance en soi au lieu de la plier à une vérité abstraite, Dieu ou Raison. La vie est son propre but à elle-même. Mais l’homme, relégué en ses terrestres contingences, saura, des déchets de ses rêves mystiques et ancestraux, se bâtir une nouvelle cathédrale, encore divine : le surhumain. Et même, après avoir (avec quel déchirement, car Nietzsche était ataviquement religieux et protestant) détruit toute métaphysique, il ouvre encore une fenêtre incertaine sur l’infini, un infini plus désespérant que celui des prophètes et des Christs : le retour éternel des choses. Une éternité géométriquement humaine, basée sur ce paradoxe invérifiable : une ligne droite prolongée à l’infini est une circonférence.

La vie est son propre but à elle-même : c’est